Archives pour la catégorie My hacks

Le Gartner Group et l’IM

Selon le Gartner Group, en 2002, la plupart des entreprises ont massivement adopté la messagerie instantanée (IM) en tant que procédé de communication, « malgré la résistance du département informatique ». Le marché des systèmes d’IM pour l’entreprise commencerait à se consolider vers 2004 et, en 2006, 75% des éditeurs actuels de messagerie instantanée pourraient avoir été rachetés ou avoir disparu. Le Gartner prévoit également qu’en 2003, l’IETF ne parviendra pas à créer de normes « largement acceptées et commercialement déployables » pour l’interopérabilité des systèmes d’IM. Et les entreprises devront se résoudre à choisir parmi des réseaux d’IM concurrents (et non compatibles). Le Gartner envisage que les gens (ou les applications) apprendront à choisir la meilleure façon de communiquer en fonction de l’urgence du message et du mode de travail de l’expéditeur et du destinataire. En attendant et en l’absence de conseils, « les utilisateurs se trouveront rapidement confrontés à une mauvaise utilisation et à la surcharge de la messagerie instantanée »… Et ces mauvais usages « risquent d’être encore pires que la surcharge du courrier électronique ». Les conseils du Gartner pour se préparer à cet avenir : évaluer l’ampleur avec laquelle l’IM grand publique est utilisée dans l’entreprise et à quelles fins, inclure l’IM dans les règles d’usages de l’informatique (chartes utilisateurs), définir des bonnes pratiques…
De beaux jours en perspective pour Jabber.

Opensourcez vos développements

Les logiciels opensource sont de plus en plus utilisés dans les grandes entreprises. 54% des DSI prévoieraient qu’en 2007, leurs principales plate-formes seront opensource.
Comme l’indique cet article du magazine Computerworld, certaines grandes entreprises adoptent même le modèle économique des développements opensource pour réduire les coûts de leur informatique. Après l' »outsourcing », l’ « opensourcing » consiste donc à publier sous licence opensource les développements menés en interne pour améliorer ou corriger un logiciel libre. Cela évite d’avoir à maintenir, en interne, une version spécifique du logiciel et permet donc de partager les coûts de développement avec d’autres entités. Cela permet également à l’entreprise de gagner en légitimité dans les communauté de développement et de pouvoir ainsi influencer de manière significative leurs stratégies de développement. La contribution des entreprises ne consiste pas seulement en code informatique mais également en documentation ou en graphisme, ressources qui font défaut pour de nombreux logiciels libres.

Propriété intellectuelle ?

The New Economist du 25 janvier publie un article sur les problématiques de propriété intellectuelle dans le cadre de l’Internet. Cet article rappelle que la vocation du droit d’auteur a été d’établir un équilibre entre la garantie d’un accès public aux flux des idées et l’incitation à la création et la distribution de travaux intellectuels par la concession de monopoles économiques temporaires et limités sur l’exploitation de ces travaux. A l’heure de l’Internet, cet équilibre semble être rompu : les industriels du contenu prétendent être spoliés de leur propriété (intellectuelle) et les défenseurs des consommateurs et des libertés individuelles dénoncent l’asphyxie de créativité entraînée par le comportement des dits-industriels.
Pour rétablir le juste équilibre, The New Economist cite plusieurs suggestions de modifications substantielles du droit d’auteur :

  • abandonner toute velléité de contrôle des copies de contenu et accorder, par la loi, aux créateurs de contenu, un droit exclusif pour l’exploitation commerciale de leurs travaux ; mais cette option pourrait entraîner de nombreux litiges portant sur la définition du caractère commercial d’une exploitation de travaux intellectuels et sur le caractère exclusif de ce droit
  • garantir la gratuité de l’accès à tout contenu mais taxer l’accès à l’Internet et aux équipements électroniques, reverser cette taxe aux distributeurs de contenus et ajuster le montant de cette taxe à une évaluation globale de la consommation de ces contenus ; mais cette option impliquerait des mesures gouvernementales très importantes, l’impossibilité d’une différenciation des distributeurs par les prix et, surtout, une taxation importante des équipements qui rendent possibles la révolution numérique
  • l’obligation pour les auteurs de déposer leur demande de droit d’auteur sur un nouveau contenu, de renouveler cette demande tous les cinq ans avec une limite du nombre de renouvellements et l’obligation d’exploiter ce droit par une distribution commerciale (faute de quoi il tombe dans le domaine public) ; cette option semble la plus réaliste, même si elle implique également une forte intervention des Etats, et est émise par un professeur de droit de l’université de Stanford, Mr Lessig.

Construire des communautés électroniques

Chromatic nous dispense ses bons conseils pour réussir la constitution et l’animation de communautés électroniques par le biais de sites Web. Son premier conseil concerne les finalités du site : quelles sont les finalités de l’animateur ? quel bénéfice un utilisateur tirera-t-il de sa participation à la communauté ? quel intérêt aurait quelqu’un à rejoindre cette communauté ? Construire une communauté sans finalité explicite serait comme créer une entreprise en oubliant qu’il s’agira de trouver des clients prêts à payer. Ensuite, l’article de Chromatic explique les mécanismes de l’effet « réseau » ou « boule de neige » : ce sont les participants satisfaits qui attireront l’essentiel des nouveaux participants. Lorsque ce mécanisme est bien enclenché, la communauté acquière une certaine inertie : ses membres se sont appropriés le site support de la communauté et deviennent un frein à tout changement du site en question. Ce qui caractérise une communauté bien constituée, ce sont notamment ses clins d’oeil culturels internes, ses « private jokes », qui sont autant de signes de reconnaissance entre ses membres. Mais il ne faut pas oublier que dans toute communauté, les gens ne participent que de manière marginale : la plupart lisent et n’écrivent pas, et ceux qui écrivent ne le font qu’occasionnellement. Pour multiplier les membres actifs, il convient d’abaisser les barrières à franchir pour pouvoir contribuer. En particulier, le nombre de membres actifs est inversement proportionnel à l’effort nécessaire pour la première contribution (inscription, …).

NTFS et FAT32

Ma soeur me demande : « C’est quoi des nfts et des fat32 ? » Je ne suis pas un spécialiste de la question, mais voici ce que je lui ai répondu.
Ce sont des « systèmes de fichiers », i.e. la manière dont une partition d’un disque dur est organisée pour stocker des fichiers. NTFS est le système de fichier de Windows NT. FAT32 est le système de fichier de Windows 95, 98, 98SE et 98ME. Windows NT et Windows 2000 connaissent les deux systèmes de fichier. Windows XP connaît sans doute également les deux mais, moi, je ne fréquente pas Windows XP.
Linux organise ses fichiers selon d’autres systèmes de fichiers. Mais Linux connaît aussi NTFS et FAT32 donc tu peux lire des partitions NTFS et FAT32 depuis un linux.
L’avantage de NTFS sur FAT32 est que ce système permet de contrôler que seuls certains utilisateurs de ton Windows ont le droit de faire certaines actions sur certains fichiers et répertoires. A priori, NTFS est également plus « robuste » que FAT32, i.e. qu’il y a moins de risque de pertes de données en cas de plantage de l’ordinateur. Je ne connais pas les inconvénients de NTFS sur FAT32 si ce n’est qu’une partition organisée en NTFS ne sera pas lisible depuis un Windows qui ne connaît que FAT32.

Jeux de rôles éducatifs via l’Internet

Un article de la revue hypermédia « Les Carbets » esquisse une méthode éducative pour lever, auprès de jeunes en échec scolaire, les blocages vis à vis de l’apprentissage. Cette méthode s’appuie sur l’organisation de jeux de rôles exploitant l’Internet, par exemple dans les lieux publics d’accès à l’Internet (cybercentres, télécentres, maisons du savoirs, …). Le fait, pour le joueur, de créer un personnage imaginaire de toutes pièces l’implique fortement. Le « maître de jeu » doit contrôler et de stimuler cet investissement personnel d’un personnage imaginaire. Le plongeon dans l’imaginaire permet de s’abstraire du contexte de l’échec scolaire ou d’un mal-être plus général. La mobilisation d’un moi imaginaire permet de retrouver « un appétit d’apprendre intact ». De plus, les réussites du personnage imaginaire, animées par le maître de jeu, valorise le joueur, ses connaissances et ses compétences individuelles.
La médiation des nouvelles technologies pour ce type de jeu (par le biais du courrier électronique, des forums et du chat) ne limite en rien le pouvoir de fascination exercé par le maître de jeu et les avatars des joueurs. Au contraire, elles offrent au jeu l’accès à l’Internet comme espace de trésors à découvrir et à explorer à condition que chacun des joueurs acquière un degré minimum d’autonomie dans cet environnement d’interaction.
Une fois valorisé dans l’imaginaire et son action médiatisée par les nouvelles technologies, il reste au joueur à vérifier dans la réalité ses compétences et connaissances. Ce retour à la réalité, fixateur de la confiance en soi, est problématique car les joueurs, contrairement à une idée courament répandue, font une distinction très nette entre l’imaginaire et le réel. L’une des solutions pour ancrer les acquis du jeu dans le réel consiste à développer des communautés de joueurs pour échanger des astuces et récits de personnifications réussies. Un autre élément de solution consiste à expliciter les relations éventuelles entre réussites virtuelles et capacités réellement acquises et donc potentiellement exploitables.
Le savoir-faire clef du maître de jeu, au-delà de la maîtrise de l’usage des outils, consiste à savoir établir l’équilibre et la relation entre l’imaginaire ludique et la réalité notamment par l’orientation des joueurs vers des missions associant les valeurs de partage, d’entraide et de créativité.

Intranets résidentiels et communautés de voisins

La « Fondation Internet Nouvelle Génération » a publié un article sur les intranets résidentiels, la mise en réseau de voisins. Les usages envisagés pour de tels intranets sont nombreux et variés : échanges entre habitants (matériels, savoirs, baby sitting), le prêt de matériel de bricolage, partage du coût d’une connexion permanente à l’Internet, formation des habitants à l’informatique, le renforcement d’une identité résidentielle ou communautaire, partage de fichiers informatiques, télégestion d’un immeuble, échanges de savoir, groupement d’achats, hébergement de sites personnels, télésurveillance, télédomotique et jeu en réseau. Le principal risque pour ce genre de projet consiste à ne pas réussir à animer et à maintenir de riches relations de bon voisinnage sans lesquelles l’intranet résidentiel pert tout son sens et tout son intérêt. C’est le réseau humain et non le réseau électronique qui fait la communauté virtuelle.

Classification des modèles économiques de l’Internet

L’un des groupes de travail de la « Fondation Internet Nouvelle Génération » propose une classification des principaux modèles économiques rencontrés sur l’Internet en fonction de critères tels que la nature du produit ou service cédé, la périodicité de la facturation, le mode de mesure de la consommation, la caractère public ou privé de la consommation, le couplage des produits ou services, les modes de financement du développement ou de l’usage, la mesure de la valorisation du financement, etc.

Sept ans pour comprendre l’intelligence collective

Le Monde rapporte le nouveau projet du philosophe Pierre Lévy à qui l’université d’Ottawa vient d’accorder un programme de recherche de 7 ans dans le champ scientifique de l’étude de la coopération intellectuelle, sur son thème de prédilection : « l’intelligence collective ». « L’intelligence collective est une approche de la société qui considère les groupes humains […] comme des systèmes cognitifs qui créent, innovent et inventent. L’objectif de ce programme de recherche es de modéliser les processus d’intelligence collective pour les tester et les améliorer. » Parmi les sujets qui pourront être abordés, on trouve le « e-learning », les processus d’apprentissage collectif et les expériences de cyberdémocratie locale. Pierre Lévy se fixe également pour objectif, dans ce cadre, de créer un logiciel libre « que pourront s’approprier des communautés pour améliorer leurs processus de coopération intellectuelle ». Le Monde qualifie Pierre Lévy de prospectiviste, de « fondamentaliste d’Internet » voire d’utopiste et souligne que celui-ci aura « sept ans pour confronter ses thèses au terrain et convaincre qu’il a eu raison avant tout le monde ». Pierre Lévy est l’un des inventeurs des « arbres de connaissance » exploités par les logiciels de la société Trivium.

TCM : introduction

L’introduction du Cluetrain Manifesto a été rédigée par un journaliste du Wall Street Journal. Selon lui, l’idée principale de cet ouvrage est que les problématiques d’entreprises sont avant tout des problématiques humaines. L’ingénierie et la gestion sont secondaires. Les conversations humaines, spontanées, sont le véritable langage des affaires. Mais vous le savez déjà si vous avez suivi les chapitres déjà signalés ici.

TCM 3: Talk is cheap

Le chapitre 3 du Cluetrain Manifesto nous rappelle que derrière chaque page Web, il y a une personne. Parfois le caractère individuel d’une page est érodé et digéré par un intestin corporate d’éditeurs, gardiens et autres factota mais une page Web porte généralement le signe d’une motivation individuelle et d’un caractère personnel. Contrairement aux médias de masse, le Web est le vecteur d’une proportion significativement plus importante d’individualités. Ce caractère personnel des pages permet l’émergence de conversations de personne à personne par le biais des nouvelles technologies. Il est particulièrement difficile de simuler l’authentificité personnelle dans de telles conversations. Et il est particulièrement important, pour les entreprises qui ne veulent pas « décrocher », de s’engager dans de telles conversations.

La thèse du Cluetrain Manifesto

La thèse exposée dans The Cluetrain Manifesto est la suivante. Les marchés sont des conversations. Leurs membres communiquent de manière naturelle, ouverte, honnête, directe, amusante et souvent choquante. A l’opposé, la plupart des entreprises ne savent qu’employer le ton monotone et sans humour des rapports annuels ou celui, trompeur, des publicités. Les employés, quant à eux, s’interconnectent progressivement les uns aux autres, comme le font les marchés. Les entreprises devraient porter attention à ceux-ci. Et surtout, elles devraient trouver le moyen de faire converser les employés interconnectés par leurs intranets avec les marchés interconnectés par l’Internet. De cela pourrait naître une conversation propice aux affaires.
Parmi les 95 points du manifeste, je retiens :

  • L’Internet permet des conversations entre individus qui n’étaient pas possibles à l’époque des médias de masse.
  • Ces conversations en réseau permettent l’émergence de nouvelles formes d’organisation et d’échange de savoirs.
  • Grâce à cela, les marchés deviennent plus intelligents, mieux informés et mieux organisés.
  • Certains marchés en réseau deviennent tellement intelligents qu’ils en savent plus sur les produits que les entreprises qui les commercialisent.
  • Les entreprises devraient sortir de leurs tours d’ivoire pour venir parler aux personnes avec qui elles souhaitent développer des relations.
  • Pour parler avec une voix humaine, les entreprises doivent partager les centres d’intérêt de leurs communautés et, surtout, doivent s’inscrire dans une communauté.
  • Les entreprises qui n’appartiennent pas à une communauté de conversation mourront.
  • De nos jours, les organigrammes ne sont plus hiérarchiques mais réticulaires. Le respect du savoir-faire l’emporte sur le respect d’une autorité abstraite.
  • La paranoïa tue la conversation. C’est l’une de ses finalités. Mais le manque de conversations ouvertes tue les entreprises.
  • Nous sommes tous à l’intérieur (salariés) et à l’extérieur (clients) des entreprises. Les frontières qui séparent ces conversations ressemblent au mur de Berlin.

Décrire les réseaux de terroristes

Ce cher Valdis Krebs illustre par
l’exemple
l’usage que l’on peut faire des techniques de cartographie
informatisée des réseaux sociaux. Et l’exemple est plaisant puisqu’il s’agit de construire, à partir de données issues de la presse, le réseau des relations établies entre des personnes impliquées dans l’organisation des attentats du 11 septembre 2001. L’analyse statistique du réseau ainsi constitué semble donner des résultats conformes à l’analyse policière de ces relations puisqu’il conforte le rôle central de Mohammed Atta dans l’activité de ce réseau. Ce type d’analyse peut avoir un rôle pour illustrer, lors de la poursuite de criminels devant la justice, la convergence de faisceaux d’indices quant au rôle de tel ou tel individu dans une organisation. Mais la nature intrinsèquement secrète de ce type d’organisation fait que les données nécessaires à la cartographie sont forcément difficiles à obtenir, sauf lors de rares phases d’activités préparatoires à un crime. Il ressort également de cette petite étude que les relations structurant une telle organisation sont souvent de nature familiales ou liées à de longues années passées ensemble dans une même école, un même environnement affectif ou relationnel. Et que sur c’est sur ce terreau de confiance que se batissent les réseaux criminels.

Animer un réseau de personnes

Valdis Krebs est un consultant spécialisé en analyse de réseaux humains grâce à des logiciels.
Selon lui, pour animer un réseau de personnes de manière à en tirer le meilleur, il faudrait :
1/ cartographier les relations « qui échange avec qui » qui constituent un réseau de workflow,
2/ cartographier les relations « qui apprend de qui » ou « qui explique à qui » qui constituent un réseau de savoir,
3/ identifier les groupes de personnes les plus connectées entre elles au sein du réseau de savoir, ce sont des communautés de savoir,
4/ développer les liens du réseau de workflow qui permettraient de connecter entre elles des communautés de savoir distinctes et qui n’existent pas encore fortement.
Ce type de liens permettraient de combler des « trous structurels » dans des réseaux de relations. C’est en comblant ces trous structurels qu’un acteur obtiendrait un avantage compétitif sur ses pairs, notamment pour créer des produits et des services innovants.
La cartographie de réseaux relationnels permettraient de distinguer des opportunités de gains de productivité par exemple en distinguant des groupes de collaborateurs distincts qui gagneraient à échanger entre eux de manière à constituer des communautés de pratiques. Toujours selon Valdis Krebs, les individus et les groupes les plus efficaces dans une organisation seraient ceux qui, par leurs relations avec d’autres groupes et individus, auraient une portée relationnelle la plus large possible dans le réseau pour un nombre minimum de relations directes.
Construire des communautés émergentes et des réseaux informels serait une activité proche de celle du jardinage : mettre des ressources à disposition, éliminer des obstacles et « attendre que ça pousse ». Les actions trop directives auraient peu d’effets ou des effets contre-productifs. Enfin, une représentation réticulaire du monde serait nécessaire pour pouvoir s’adapter au chaos et à la complexité de changements continuels. Valdis Krebs recommande donc aux professionnels des ressources humaines de se concentrer non plus sur l’individu (ou même le collectif) mais sur les réseaux relationnels entre individus et groupes.

TCM: Markets are conversations

Le chapitre 4 du ClueTrain Manifesto établit une analogie entre les marchés et les
conversations. Ci-après, quelques reprises d’idées-clefs et citations de
passages remarquables.
– Par exemple, l’un des principes du marketing « de masse » serait de diffuser
un message au marché (« mon produit est le meilleur… »). Mais il n’existe
aucune demande pour de tels messages. C’est pourquoi l’auteur qualifie le
marketing classique d’Anti-Conversation. Personne, sur le marché, n’a envie
de porter attention à de tels messages. C’est pourquoi les commerciaux
jouent la comédie, les communiqués de presse se racontent comme des
histoires et les publicités se déguisent en messages éducatifs.
Heureusement, les consommateurs sont de moins en moins dupes. De même, le
marketing « classique » s’apparente à la guerre : on parle de « campagnes
marketing », on « cible » des marchés, on bombarde la cible de messages pour
« pénétrer » le marché. Les auteurs regrettent un marché dans lequel
producteurs et consommateurs se rencontreraient et engageraient des
conversations sur la base d’intérêts respectifs. Heureusement, le long
silence des conversations du marché, dû à l’interruption de la consommation
de masse, serait sur le point de cesser. Les marchés, via l’Internet,
deviendraient des lieux de conversation « hautement connectés » via lesquels
le mot « market » perdrait son usage de verbe pour redevenir un nom. Et ce
renouveau de conversation se concentre sur la valeur : non seulement la
valeur du produit mais aussi la/les valeur/s de l’entreprise vendeuse.
– Alors, quel avenir pour le marketing ? Prendre possession des
conversations ? Diriger les conversations ? Etourdir le marché sous des
messages plus forts ? Concurrencer les conversations ? Les relations
publiques sont un exemple de domaine mal en point pour le marketing : il ne
fait même pas bon dire que l’on travaille dans une entreprise de relations
publiques. Quelque chose ne semble pas tourner rond dans cette profession.
Par exemple, un communiqué de presse de l’industrie informatique décrit
généralement une annonce qui n’a pas été faite, pour un produit qui n’est
pas encore disponible, citant des personnes qui n’ont rien dit, et destinée
à un groupe de personne qui n’en ont globalement rien à faire. Les
communiqués de presse sont rédigés de manière malhonnête pour se faire
passer pour des nouvelles, sous une forme facilement intégrable dans tout
article.
– Autre critique du marketing tel qu’on le connait : la plupart des sites
Web corporate ressemblent à des plaquettes, en tout aussi peu informatif et
en plus lourd à manipuler. Pour autant, les sites ne doivent pas devenir des
énumérations de faits informatifs mais sans âmes. Un site doit avoir « une
voix », exprimer un point de vue et mettre en contact direct le visiteur avec
les personnes dans l’organisation. Non seulement les clients veulent parler
avec « de vraies personnes » dans l’organisation mais les employés meurent
d’envie de parler à de vrais clients. Ils veulent se dire la vérité. Un peu
plus loin, on peut lire que le client comprend rapidement si son fournisseur
veut engager une conversation avec lui ou bien si il veut lui ôter l’argent
de la poche, de même que l’on sait rapidement si les employés d’un
fournisseur s’inquiète réellement de leur travail ou si ils ne se séparent
jamais de leur CV au cas où. On devine rapidement si une entreprise a
l’habitude de mentir ou de jouer franc-jeu.
– Pour en revenir au marketing, les technologies industrielles et le
marketing de masse avaient rendu les produits remplaçables, les travailleurs
remplaçables et les clients remplaçables. Aujourd’hui, les nouvelles
technologies semblent rendre remplaçables les marchants. Serait-ce une
revanche du marché de masse ?
– Que devrait faire le bon marchand ? Sans doute vous permettre de parler
avec ses experts. Mais aussi vous mettre en contact direct avec le reste du
marché, grâce au Web. C’est ce que fait Amazon.com avec ses fameux
commentaires et notations des lecteurs. En ce qui concerne le support
technique, les marchants devraient renvoyer vers des communautés ouvertes
dédiées telles que les groupes de discussion Usenet.
– « Si l’entreprise se campe dans des attitudes artificielles, alors ses
hommes doivent la suivre. Si, au contraire, l’entreprise est à l’aise dans
ses baskets, alors c’est un grand soulagement pour le corps corporate ».
– Bref, ce chapitre 4 est assez riche, la critique du marketing « classique »
est intelligente et met en avant un certain nombre de situations dans
lesquelles l’entreprise est mise en porte-à-faux. Ci-avant, ce ne sont que
quelques notes personnelles de passages m’ayant marqués mais il y a beaucoup
plus à apprendre en lisant le document lui-même !

The Cluetrain Manifesto: chapter two

Après le chapitre 6, je continue dans l’ordre avec le chapitre 2
(http://www.gonzonmarkets.com/cluetrain/longing.html). « Entreprendre, est-ce
gérer ? » s’interroge l’un des auteurs. L’entreprise gère ses ressources
financières, matérielles, humaines grosso modo toujours de la même façon :
en déterminant, prédisant, traitant et mesurant des facteurs quantifiables.
Au point de laisser croire que nous devrions gérer nos vies : pour éviter
les risques, les incidents, les injustices, la nécessité de porter attention
à tout et n’importe quoi. Mais, comme en matière de sécurité, même avec le
meilleur système de gestion disponible, il n’existe pas de risque zéro. Les
auteurs nous invitent à nous approprier les risques inhérents au marché sans
nous leurrer quant à leur caractère « gérable ». L’humilité vis-à-vis du
caractère non gérable de l’entreprise permettrait d’adopter une attitude
plus à même de faire profiter celle-ci des réseaux de communication établis
via les nouvelles technologies.

TCM: 1, Internet Apocalypso

La suite de mes notes personnelles sur les passages qui m’ont marqué dans le
ClueTrain Manifesto. Le chapitre 1 du
ClueTrain Manifesto affirme
que nous aspirons à établir des ponts entre
activité professionnelle et centres d’intérêt personnels. Nous cherchons à
nous inscrire dans un monde qui a du sens et non dans un marché qui nous
aliène ni dans une organisation qui nous gère. Pour cela, nous pourrions
bénéficier de nouvelles formes d’échanges, de « conversations », qui émergent
via les technologies issues de l’Internet (mais ayant peu avoir, sur le
fond, avec ces technologies). En particulier, ces conversations foisonnent
d’une part sur le marché (entre consommateurs) et d’autre part dans
l’entreprise (entre employés). Mais un firewall métaphorique les sépare
encore l’une de l’autre. Ce firewall n’est ni plus ni moins qu’une culture
d’entreprise traditionnelle, conservatrice et craintive. La dichotomie entre
le je-travailleur et le je-consommateur se renforce donc. A-t-elle encore un
sens aujourd’hui ? Doit-elle perdurer ? Selon les auteurs, une telle
séparation handicape la capacité de l’entreprise à s’engager dans des
collaborations productives avec des acteurs externes. La sécurité souvent
invoquée comme justification peut aller jusqu’à bloquer l’accès de
l’entreprise aux nouvelles formes de ses marchés. La perspective que des
employés puissent agir de manière autonome dans leurs collaborations avec
des acteurs externes fait peur. Les marchés prendraient-ils peu à peu un
visage humain (cf. « l’Internet à visages humains ») plutôt qu’un profil
statistique ? Le but du jeu serait de construire des communautés ouvertes
conviviales et des « écologies de savoirs » plutôt que de tirer profit de
secteurs démographiques. Comment se fait-il que des entreprises aient besoin
de dépenser des millions en études de marché ? Comment se fait-il que les
entreprises ne connaissent plus leurs marchés par coeur ?
– L’une des nouvelles formes de conversation entre employés pourrait
s’appuyer sur la gestion de la qualité totale (TQM). En effet, le TQM met
l’accent sur le capital de connaissance de l’individu dans sa pratique de
travail et les employés sont donc encouragés à partager ce qu’ils savent
avec les autres employés de l’entreprise, quel que soit leurs positions
respectives dans l’organisation. Les intranet corporate d’entreprises
fidèles aux principes du TQM foisonneraient donc de conversations entre
employés riches de savoirs reconnus et valorisés. Mais force est de
constater que la reconnaissance du savoir des individus par les
organisations est une oeuvre loin d’être achevée.
– La plupart des stratégies e-commerce restent fidèles au schéma marketing
classique qui consiste à rechercher un marché de masse lucratif alors même
que les technologies de l’Internet feraient exploser le marché en une
multitude de niches aux besoins divergents. Les spécialistes du marketing
essaient coûte que coûte de plaquer sur les marchés de l’Internet les mêmes
modèles de diffusion top-down en espérant par exemple faire acheter un même
contenu par des millions de foyers. « Une télévision avec un bouton ‘acheter’
? Wow ! » Ceux-là n’ont encore rien compris à l’Internet et perdent leur
argent avec des concepts de WebTV déjà obsolètes. Les auteurs établissent
également une analogie entre la mentalité « broadcast » des médias
traditionnels et la mentalité bureaucratique de dissémination des pouvoirs
dans l’entreprise pyramidale.
– Finalement, l’important ne semble pas être la technologie mais le
caractère culturellement nouveau du réseautage via ces technologies. Mais
rares sont les dirigeants d’entreprise qui le comprennent : trop peu
nombreux sont ceux dont l’expérience personnelle « en ligne » s’avère
suffisante. C’est pourquoi leur premier réflexe, lorsqu’il s’agit de batir
un intranet, est de tenter de reproduire « en ligne » les structures de
l’organisation (en autant de rubriques hiérarchisées…) et d’imposer des
directives mortifères (« Toutes les pages Web doivent être approuvées par la
Direction pour la Prévention du Travail utile »). En tuant l’enthousiasme des
collaborateurs « de la base » qui possèdent une richesse de savoirs
inévaluable, on obtient souvent un intranet immense, graphiquement « pro »,
très cher mais que tout le monde ignore ou presque.
– Comment valoriser les savoirs ? Pas de manière paternaliste, mais plutôt
en reconnaissant l’autorité que donne la compétence et le métier ;
certainement pas en s’appropriant le travail même artisanal de rédacteurs de
pages. Les entreprises reproduisent souvent des erreurs classiques de
management en essayant de « mettre de l’ordre » dans les intranets : ceux-ci
en deviennent rigides et constipés ; ils finissent par en mourir. Les
gestionnaires d’intranet ne sont plus mus par une conviction personnelle de
contribuer à un travail utile mais par la peur de perdre le contrôle (ou
l’appétit du pouvoir). Dans ces mêmes entreprises, on dépense des millions
pour essayer de savoir qui sont ses clients. « Ils » ne le savent plus. « Ils »
se sont barricadés dans « leurs » bureaux de direction et ont érigé des
firewall par dessus le tout. (Les auteurs du CTM savent faire usage de la
métaphore). Pourtant, bientôt peut-être, ces entreprises ouvriront à leurs
interlocuteurs des portions significatives de leurs intranet -en apprenant à
mieux protéger leurs secrets stratégiques- afin de développer des relations
avec leurs marchés plutôt que d’essayer de s’en défendre. Un maître Zen
aurait dit : « Pour contrôler ta vache, donne-lui un plus vaste paturage ».
Les entreprises qui en sont déjà là sont en perpétuelle recherche
d’informations de valeur à partager avec leurs clients et prospects, qui via
le Web, qui via des sites de téléchargement, qui via des mailing lists ou
toute autre forme de communication. Leur souci principal n’est plus de
protéger leurs données sans discernement mais d’offrir le plus
d’informations possibles. C’est ainsi qu’elle restent en contact avec le
marché, qu’elles entretiennent leur positionnement concurrentiel et qu’elles
retiennent l’attention de leurs clients. Ce type d’entreprises créent une
nouvelle forme d’identité institutionnelle : non pas une identité basée sur
les campagnes de presse à répétition pour la notoriété de la marque, mais
une identité basée sur une communication personnalisée et pleine de sens. Le
seul moyen de paraître authentique sur les nouveaux marchés en ligne serait
de donner le pouvoir aux employés de partager le plus largement possible
leur intelligence. Personnellement, la combinaison de cet enjeu avec celui
de la logique de guerre économique me paraît un challenge intellectuellement
très alléchant.
– Les entreprises savent en général peu ce qui se dit sur elles via
l’Internet. Mais, en dehors de celles qui sont complètement à côté de la
plaque, elles sont toutes très gênées de savoir que des conversations les
concernant ont lieu et qu’elles n’ont aucun contrôle sur celles-ci. Et, pour
finir par une appréciation personnelle, je ne pense pas que les options du
type « management des perceptions » à la Burson-Marsteller soient des
solutions acceptables pour une entreprise honnête.