Les business models rentables des entreprises sociales…

… étude des solutions innovantes. C’est le titre du mémoire de fin d’études que prépare Coralie Gaudoux, qui vient de me contacter. Avec son accord, je publie ici (sous licence CC-BY-SA) le questionnaire qu’elle a préparé pour cette étude. Régulièrement, des étudiants m’interrogent sur Wecena. J’essaie désormais de leur répondre publiquement, pour que cela profite éventuellement à d’autres.

Questionnaire pour l’étude terrain

La mission sociale

Quelle est le constat de départ ? Le problème social et/ou environnemental à résoudre ?

Constat de départ : les associations innovantes ont difficilement accès aux compétences technologiques qui leur permettraient de faciliter leur mission de transformation/résolution de problèmes de société. 2ème constat : chaque jour, de l’ordre de 10.000 informaticiens salariés des SSII sont payés à ne rien faire (phénomène structurel de l’intercontrat).

Quelle est la mission sociale de l’Entreprise ?

Démultiplier la capacité de résolution de problèmes de société des innovateurs sociaux en leur donnant accès à l’agilité et aux compétences technologiques des professionnels de l’informatique.

Quels sont ses objectifs ? Ses principes d’action ?

cf. notre business plan social, partie « mission »

La cible

Qui sont les bénéficiaires directs et indirects de l’activité de l’entreprise sociale ?

Bénéficiaires directs = les associations d’intérêt général dont les projets reçoivent les contributions d’informaticiens. (Exemple : association BrailleNet)

Bénéficiaires indirects = les bénéficiaires finaux des activités de ces associations (Exemple : lecteur handicapé utilisant la bibliothèque numérique de l’association BrailleNet).

Autres bénéficiaires indirects = les informaticiens participants, qui y trouvent leur compte en termes de fierté personnelle et professionnelle, de sens du service, de sentiment d’utilité, etc.

cf. notre business plan, partie « bénéficiaires »

Qui sont les clients ?

Les clients sont les associations porteuses de projets.

Le produit/service

Quel est le produit/ le service proposé ?

Package de 3 prestations :

  1. accès à une plate-forme de travail collaboratif permettant l’intervention, via Internet, d’informaticiens au profit de l’association
  2. assistance de l’association à l’encadrement des prestations réalisées par ces volontaires informaticiens et assistance technologique (conseil et réalisation de logiciels sur mesure)
  3. représentation des projets de l’association en recherche de volontaires, auprès des sociétés de service en informatique (pour les convaincre de faire du wecena et faciliter la relation association/entreprise au quotidien)

Comment est-il produit ? Quelles sont les particularités, les innovations dans la production de ce service ?

cf. notre business plan social, partie processus de production

La principale innovation dans la production de ce service consiste à appliquer au secteur de la solidarité et du mécénat de compétences les pratiques, méthodes et outils de « crowdsourcing » (mobilisation d’une foule de contributeurs occasionnels) déjà exploitées par les communautés d’informaticiens du logiciel libre (open source) et par les communautés d’internautes contribuant à des projets tels que la wikipédia. Cette transposition offre des modalités de gestion de la connaissance des contributeurs compatible avec le taux de rotation astronomique de ces contributeurs sur les projets associatifs.

Comment est-il distribué ? Quelles sont les particularités, les innovations dans la distribution de ce service ?

Le service est distribué en direct aux associations via Internet dans la plupart des cas (certaines missions s’effectuent « sur place » dans les locaux de l’association bénéficiaire, en région parisienne, mais c’est plus rare). La prestation de représentation des associations auprès des SSII s’effectue sous la forme d’un process de vente B2B de services en face à face avec les interlocuteurs RH, communication ou marketing des SSII.

L’environnement

Qui sont les concurrents ?

cf. notre business plan social, parties « alternatives »

Qui sont les partenaires ? Sous traitants ?

Les principaux partenaires jouent un rôle de prescripteur du wecena auprès des SSII, ou de réseau d’accompagnement (ESSEC/Antropia). cf. rubrique « partenaires » du site wecena.com

Les fournisseurs principaux sont un cabinet d’expertise-comptable, un hébergeur Internet pour le serveur de la plate-forme collaborative et une banque pour les opérations courantes.

Quelle est la législation relative au projet ?

Le principal cadre législatif est celui du régime fiscal du mécénat (article 238 bis du code général des impôts) renforcé depuis la « loi Aillagon d’août 2003 ».

Dans un second temps, Wecena expérimente un financement alternatifs de certaines opérations via le mécanisme de déductibilité de certaines dépenses de l’entreprise du montant de leur contribution annuelle à l’AGEFIPH au titre de leur obligation d’emploi de travailleurs handicapés (arrêté du 9 février 2006).

Le droit du travail français est également très structurant pour l’activité puisque c’est lui qui justifie en grande partie le volume du phénomène de l’intercontrat en SSII.

L’organisation

Quel est le type d’organisation ? La structure juridique ?

Société unipersonnelle à Responsabilité Limitée (EURL).

cf. « pourquoi avoir choisi un statut de société ? »

Quelles sont les ressources humaines ? Il-y-a-t-il des particularités dans les ressources humaines sélectionnées ?

Pour le moment, le gérant est seul (c’est moi !). J’envisage l’embauche d’un consultant en conduite de projets informatiques ayant une expérience du secteur de la solidarité puis d’un business developer pour accélérer le développement.

Les créations de valeurs

Quel est le modèle de revenus ? (explication rapide des postes de dépenses et de revenus)

Les prestations aux associations clientes et bénéficiaires donnent lieu à une facture mensuelle d’une valeur proportionnelle (deux tiers) à la valeur des prestations reçues par l’association sous la forme de dons en nature des SSII mécènes. Plus les SSII mécènes envoient des salariés volontaires, plus Wecena a du travail à fournir à l’association pour aider à les accueillir et à les encadrer et plus Wecena facture aux associations.

Mais les associations n’ont pas les moyens de payer par elles-mêmes. Les SSII participantes s’engagent donc à financer l’intégralité de l’opération en y consacrant leur économie d’impôts (ou bien un budget de leur mission handicap si les dépenses sont déductibles de leur contribution AGEFIPH). Plus elles réalisent de prestation via leurs salariés volontaires, plus leur « don en nature » a de valeur, plus elles ont droit à une économie d’impôts. Cette économie d’impôts fait l’objet d’un don à l’association bénéficiaire qui peut ainsi régler Wecena. Au final, le wecena ne rapporte pas directement d’argent à la SSII mécène (ni ne lui coûte, d’ailleurs), pas plus qu’à l’association bénéficiaire. Les bénéfices pour la SSII mécène sont immatériels et relatifs au renforcement de sa RSE (fierté d’appartenance, marque employeur, motivation des salariés, employabilité renforcée, limitation des risques psycho-sociaux, etc.).

cf. le schéma du modèle économique du wecena

Quelle est la valeur sociale et environnementale créée le long de la chaine de valeur ?

Est-ce que les liens ci-dessous répondent suffisamment à cette question ?

Comment se mesure l’impact social ?

cf. cette partie de la FAQ ainsi que notre business plan social, partie « évaluation et mesure de l’impact social »

La méthode SROI a été mise en ½uvre sur l’un des projets associatifs.

Voila !

2 réflexions au sujet de « Les business models rentables des entreprises sociales… »

  1. Sig Auteur de l’article

    Question subsidiaire de Coralie :

    > J’ai une dernière question: connaissez vous d’autres entreprises
    > sociales en France (qui ont un statut d’entreprise et non d’association)
    > qui se rémunèrent sur les économies d’impôts?

    Je connais des entreprises qui travaillent dans le secteur du mécénat (notamment de compétences). Donc les sociétés mécènes avec qui elles ont des contrats touchent ces économies d’impôts mécénat. Mais aucune de ces sociétés, à ma connaissance, n’a systématisé le reversement des économies d’impôts au projet soutenu. En général, le mécène garde l’économie d’impôts dans sa poche et ne paye que « un peu » de frais à l’entreprise sociale qui agit alors en tant qu’intermédiaire ou distributeur mais apporte peu de valeur ajoutée.

    La plupart des sociétés mécènes comptent sur ces économies d’impôts pour atténuer le coût que représente leur don. Les entreprises sociales (ou non) qui interviennent comme intermédiaire du mécénat interviennent habituellement sur la mise en relation entreprises/associations (koeo.net, mecenova.org) ou sur la réalisation de missions de formation ou d’études (ADMICAL) ou de conseil (IMS). Pour les sociétés mécènes, qui prennent en charge ces coûts, le budget nécessaire à la prise en charge de ces prestations est étudié en regard des économies d’impôts permises par l’opération et du coût du don. Mais économies d’impôts et coûts des prestations ne sont pas mécaniquement liés.

    L’une des originalités du wecena, c’est de permettre de donner des choses qui coûtent à l’entreprise (intercontrat) qu’elle les donne ou non (il s’agit de salaires) et donc de permettre de consacrer l’économie d’impôts au soutien au projet bénéficiaire. On retrouve la même logique de don d’invendu avec les dons alimentaires (Restos du C½ur, Croix-Rouge, banques alimentaires diverses) et les dons d’invendus non alimentaires (agence du don en nature). Dans le cas des dons d’invendus (alimentaires ou non), la valeur ajoutée du prestataire est un travail de distribution. Dans le cas des dons d’intercontrats (prestations de services), la valeur ajoutée est aussi dans l’encadrement des prestations et le partage des connaissances entre invervenants successifs, ce qui est beaucoup plus coûteux. Le coût et la valeur ajoutée de la prestation sont plus élevés et justifient un emploi systématique de 100% des économies d’impôts possibles.

  2. Coralie

    Un grand merci pour vos réponses détaillées qui me sont d’une grande aide dans la rédaction de mon mémoire !

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